Solitude 11 février, 2010
Posté par hiram3330 dans : Billevesees & coquecigrues , trackbackSolitude
Huit lettres et quatre syllabes pour un mot qui souvent touche au plus profond de soi .. huit représentant l’infini, quatre la matérialité, bref ce terme n’est pas une fin, mais un état …. toujours délicat à ressentir.
C’est tout de même assez cocasse de constater une population en augmentation constante, débridée même .., voire exponentielle et se retrouver en son sein seul.
Une foule me cerne, une foule m’étouffe, une foule me pousse et moi, là, je m’interroge sur la multitude qui grouille, se répand, se croise et s’enfuit à mon passage, comme si quelquefois j’errai tel un pestiféré du moyen âge avec sa crécelle .. et son étoile sur le coeur, déjà …
Mes pas, assourdis, me mènent au bord de l’eau pour que je puisse me mirer, au calme, et voir mon image se troubler et couler au fil de l’eau .. une image qui frissonne, une image qui hoquette en fonction du courant, toujours descendant en aval, sans état d’âme .. lui. Ce flux perpétuel déforme mes traits, comme dans un instant plus tard la chute de gouttes sur l’onde, en créant des cercles d’infini, m’aspire dans une vision onirique d’une image perturbée.
Mystère de l’être que d’être unique, certes, mais surtout quelque fois si isolé que la multitude ne le voit même pas .. qu’il se heurte à l’indifférence ambiante, à l’indifférence de l’autre, à l’indifférence de lui même.
Même le miroir qu’il peut tenter de fixer ne lui retourne qu’un brouillard grisâtre et terne, un peu comme si ses yeux eux-mêmes étaient embués .. allez savoir pourquoi ….
Lorsque la buée s’évapore, lorsque le tain s’éclaire d’un halo blafard, que voit-il ? Son ombre chinoise se découpant en silhouette, ses rêves brisés teintés de pourpre, un reflet qui se dissout en s’éloignant, des étoiles qui s’éteignent comme sous le coup d’un souffle acidulé, des ténèbres qui rampent et viennent recouvrir les éclats d’un passé déchiré ….
Solitude rime avec tristesse …. hors les règles scolastiques de la poésie classique.
Mes pas, lourds, voûtent ma démarche incertaine le long de la rive de ce serpent d’eau méandreux qui va se jeter et se perdre dans l’immensité salée … salée comme …. cette buée qui colle et gêne mon regard, et trouble mon souvenir qui dégouline et se fond dans un crépuscule naissant, en plein Midi.
Il est Midi .. le soleil pointe au zénith et mon ombre est avalée, et mon crâne est carbonisé par les rayons impitoyables, et mon regard est brûlé par les éclats de mirages qui viennent et vont. L’image se consume en se tordant et l’eau salée ne peut y remédier, et l’eau du ciel est absente, et l’eau …. est absorbé depuis longtemps dans ces champs qui dégoulinent d’un soleil agressif.
Solitude …. même mon ombre m’a abandonné ce Midi.
Je me tourne et me retourne, un peu hagard, un peu affolé de ces gens qui me cernent et me bousculent sans me voir, qui glissent vers un ailleurs où ils sont attendus, eux .. même leurs rêves me soufflettent au passage.
Être devenu transparent est une sensation rare, déroutante, déconcertante, désolante .. sans ombre et sans reflet, l’horreur du non-être conscient, fantôme me voilà devenu .. sans consistance, sans assistance.
Ça me pèse, comme une collection de poids sur une balance Roberval, comme un abus de sucreries un soir d’hiver, comme un jour de travail férié, comme …. comme ce masque que je ne reconnais pas dans la glace qui m’épie.
Une chanson susurre à mes oreille, comme Piaf … « emporté par la foule » … mais c’est un maelström dont il s’agit qui cogne et heurte la paroi de mon crâne, et qui n’en peut mais, et qui ne peut s’évader, et qui geint, et qui …. galope et tambourine en des plaintes aiguës faisant crisser mes tympans.
Mes pas d’aveugle me conduisent nulle part, me conduisent partout, me poussent vers cette silhouette qui s’enfuit dans le tumulte muet en laissant des gouttelettes d’hier, des odeurs d’un passé, des flagrances qui se dissolvent dans le vent de ma course vacillante maintenant.
Tout s’estompe comme une esquisse sur une toile défraîchie, tout s’envole comme une plume tachée d’encre, tout s’évapore comme la peinture sur un lavis, tout ….. reste un mirage de silhouette se démultipliant dans une cascade de miroirs de foire, déformant, grossissant, grimaçant … étonnant.
Seul.
Mes pas résonnent dans le vide de mon errance allant d’un arbre sans feuilles, à un tas de feuilles déjà jaunies … mes pas me font tituber sous l’agression d’un mistral qui siffle comme un serpent … mes pas divaguent comme ivre de souvenirs étiolés …. mes pas … mais pas.
Je me courbe en recherche de cette ombre évadée, je me courbe sous le poids du soleil qui égruge mes épaules, je ploie pour éviter les sautes d’humeur des bourrasques qui me giflent, je suis écacher sous les assauts d’images qui m’étouffent … seul.
Du zénith fond du plomb …. du zénith exsude des giclées de grêle …. du zénith se coagulent des clichés sépia virant à l’andrinople ….
Et je chancelle, vacille, zigzague entre ces ondées de débris moroses .. mots roses .. en me heurtant et me colletant avec ces chimères qui me coupent la route, dont je ne vois plus la trace sabouler que je suis par cette multitude grouillante que fouille mon regard d’aveugle .. Je suis dans une forêt, dans une jungle d’inconnus qui me percent sans me voir, qui piétinent l’absence de mon ombre.
Le zénith m’ôte toutes possibilités d’hasarder un furtif regard pâlissant sur une voûte dérobée ….
Solitude.
Chris
février 6010
Commentaires»
Répondre à Aurore Annuler la réponse.
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.
Poursuivant ma route en soli_taire, mes pas m’ont conduite à plusieurs reprises à la périphérie de ton imaginaire, un peu comme une vague légère qui m’emmène au large puis une autre qui me ramène vers tes rivages… alors j’ai fini par me poser un instant… à peine à un bruissement de ton être… moment indéfinissable où les mots, les émotions, les formes, les odeurs, les sons ne sont pas… juste les vibrations qui résonnent telles des notes virevoltant harmonieusement sur une partition… celle du chant de l’humanité…
Et puis, splash… j’atterris, ou plutôt j’amerris sur une onde d’un bleu profond sur laquelle une goutte va se poser et former un cercle qui va se perdre dans (mon) l’immensité… seule mais pas triste, ni mélancolique, ni amère et pourtant, que ne m’est-il arrivé, souventes fois, comme vous, comme toi, de ressentir cet état de latente lourdeur ; lourdeur insupportable d’être seul face à soi, un soi que l’on ne reconnaît pas, que l’on n’aime pas… alors on cherche l’autre soi-même (voire son autre) à travers les autres qui sont dans le même état de déserrance que nous ; chacun se mirant dans le regard de son vis-à-vis comme pour y trouver un sourire, une expression rassurante… comme lorsque nous cherchions le regard maternel à l’aube des premiers instants de notre vie.
Premiers instants où pouce et chuchu apparaissent… la chuchu, c’est la tétine pour les gens bons de Bayonne et autres contrées alentours du pays de l’Adour… la chu_chu, rassurante comme le chuchotement d’une maman à l’oreille de son petit d’homme et qui le bercera vers le royaume des songes pour y retrouver.., cette « image » me renvoie aux personnages de « Bonne nuit les petits » : Pimprenelle (Pernelle) et Nicolas, le marchand de sable et le(a) grand(e) nounOur(e)…
Et puis, presque instantanément, pouce et chuchu seront « reliés » à un objet (transitionnel) : le nin_nin, le doudou… chaud_doudou, tout doux tout mou, prémice du jeu, auquel le nourrisson vouera passion et addiction qui perdurera, quels que soient les « objets » qui s’y substitueront et ce, pendant longtemps, voire très longtemps… objet qui sera en quelque sorte le point de passage entre l’intérieur et l’extérieur au moment du stade du miroir.
L’union duelle mère/bébé n’est plus (ça ne vous évoque rien cette « séparation » ?…), le bambin prend conscience petit à petit de la(sa) réalité extérieure, où se poursuit la construction de sa personnalité égotiste … oui, je sais, c’est un pléonasme ! C’est juste histoire d’enfoncer un peu le clou ou de forcer le trait… personnalité qui va se renforcer autour de la mère (et aussi de son environnement bien sûr) ; nul n’est besoin de préciser que la mère, ou ce qui en tient lieu, a une place prépondérante, car elle est aux premières loges… et un rôle déterminant dans l’apprentissage de la vie des êtres dont elle est en charge…
« Miroir, joli miroir »… non, on n’y est pas encore, on en est loin, bien loin de se poser cette question (quand on se la pose !) ; d’ailleurs, ne serait-ce pas à partir de ce stade que l’enfant s’éloigne, au fil de sa construction égotiste, de son être essentiel ? Et la fontanelle, qui va se refermer quelques mois plut tard… là aussi, je m’interroge… tiens, à propos de tête, tu évoques souvent ton crâne d’œuf (alchimie quand tu nous tiens, n’est-ce pas ?!) de piaf, de canari, de serein cool et zen, et bien, je vais encore parler d’équilibre… à chacun son droit-fil (à un frôlement sur la même trame…) : vous, gents damoiseaux dont la calvitie naissante ou débordante sent le soufre, de grâce n’en souffrez pas… c’est ce qui fait votre charme et croyez-moi, nous les gentes damois_ailes, ne sommes pas en restes car, lorsque que le mercure commence à des_cendre en cette période automnale, nous devons aussi faire le deuil de nos défunts cheveux qui, comme les feuilles, se ramassent à l’appel (du feu…).
Bon, revenons-en à nos moutons… à ce propos, je souris lorsque je fais transhumer ces formes ouatées, planquées dessous mon lit, vers mon aspirateur qui les « garde sans le chien » ! Ca, c’est pour les joueurs de tarot… celui où on appelle les rois.. et pourquoi pas les reines d’ailleurs ?!.. ; tarot pas si profane que cela… 21 atouts…, si l’on ajoute, on obtient 3… et si l’on inverse 12, ce qui nous conduit… derrière le miroir.
On se retourne… comme pour se préparer à la (re)naissance… mais avant d’inverser la vapeur… avant cette longue traversée qui nous conduira jusqu’aux tréfonds de notre animalité, on va jouer à un coup j’y vais et un coup je repars vite, très vite… un peu comme le fameux doudou (ou la spatule du doc.) que le bambin va jeter puis ramener à lui… toujours ce mouvement entre l’intérieur et l’extérieur… et puis, à force de courage et de ténacité on bascule… et même avec un accompagnement, c’est seul que l’on va entamer la longue et douloureuse remontée vers ses origines (comme les saumons !), que l’on va faire le lien, entre ce que nous avons approuvé parce qu’éprouvé et nos lectures, nos rencontres qui sont des déclencheurs, des révélateurs, des passeurs, un peu comme nos sens lorsqu’ils ne nous trompent pas, enfin, là aussi c’est une question d’équilibre … seul, car « la vision d’un homme ne prête pas ses ailes à un autre homme »… fussent-elles à un bruissement…
Solitaire… on avance seul et en silence (et en souffrance et même extrême souffrance… là c’est chaud !) dans les méandres de notre labyrinthe intérieur… alors oui, cette solitude bien que choisie nous pèse parfois… solitude qui nous oppresse, nous étouffe, nous rend mélancolique et amer… solitude, amer, voyons, si « tu » te retires du mot (maux) et que tu viens te glisser, droit comme un « i » dans l’amer, on obtient « solide » et « aimer » comme… la force de l’amour qui siège dans le cœur de tous les hommes… l’aurions-nous oublié ?
Le cœur ou plutôt l’intelligence du coeur, située (encore une autre aire transitionnelle) ni à l’intérieur, ni à l’extérieur, pont entre le fini et l’infini, le microcosme et le macrocosme, auquel on accède par la voie de l’inspir/expir du milieu… est notre boussole, comme le balancier du funambule, qui nous permet de poursuive le voyage… sans perdre le Nord… sur le fil de notre(nos ?)vie… et moi, je poursuis le mien, d’ailleurs je file vers les cieux… l’essieu… encore et toujours la mouvance cyclique… là, ça vaut 10 ! Hasard ?…