Transhumance 19 juin, 2010
Posté par hiram3330 dans : Billevesees & coquecigrues , trackbackTranshumance
C’est la saison, hé oui .. l’hiver s’est dissipé, le printemps germe, le temps est venu de ce déplacement annuel plein des charmes d’une coutume ancestrale, d’une « mode » plus récente, d’une migration encadrée .. En fait la transhumance est double, duelle, car elle est flux et reflux …. estivale et hivernale ….
Dans la brume, à travers le brouillard, crevant les nuages bas, la harde se meut … bariolée, ivre des senteurs fortes, trépignant sur la pavé disjoint, dans un vacarme carillonnant …. Le départ est prit, le but défini, le trajet tracé, tout s’ébranle.
Fantomatique est ce cortège hésitant qui déchire le sol en zigzaguant d’un bord à l’autre, se heurtant à la brouillasse, divaguant dans la ouate humide, pour enfin s’extirper de cette glu impalpable des milliards de gouttelettes infimes qui brouillent la vue et pèguent les pas.
Insolite et bizarre, c’est la nuit qui règne là et qui découpe les minutes grinçantes, un peu comme une scie rouillée, ou une voix éraillée .. Étrange cette vision nocturne inattendue à mon regard d’écriveur …. Que ce passe-t-il donc ? Ai-je atteint une dimension inconnue, c’est inouï ces ténèbres qui clignotent devant ma vue et dissimulent les silhouettes évanescentes d’un troupeau éthéré.
Déchirement !
Troubles, une poignée de silhouettes mal définies se découpent sur l’ombre de la nuit, le troupeau n’est pas multitude .. mais je ne distingue pas encore de quoi il peut bien s’agir ici, dans une rumeur qui s’enfle d’une drôle de cacophonie qui blesse mes esgourdes.
Qu’ouïs-je, j’en reste ébahi …. des mots rauques ricochent dans les ténèbres et viennent écorner mes oreilles qui devinent, plus qu’elles n’entendent … » la digue du … en revenant de Nantes, la digue du … …. « . J’en suis soufflé (et pas au fromage), rêve-je ?
Je crois distinguer, sortant des ténèbres, comme une …. barrique ! Oui tu lis bien (non pas Libyen), ce genre de tonneau au diamètre imposant, pouvant contenir des flots de jus de raisin fermenté. Mais icelui est muni de pattes, comme une étrange figure humanoïde portant, apparemment, des attributs féminins. Dandinant même est cette apparition, dents dînant aussi qui sait.
J’en reste muet, et assourdi par la mélopée sauvage d’un autre âge qui rugit et surgit des catacombes d’un antre inconnu.
D’un coup c’est un sifflement qui se faufile jusqu’à moi …. une autre créature ubuesque se profile, ventre à terre, verdâtre, comme le serpent de « mogly » …C’est un serpent .. un brin ventru qui cherche mon regard pour tenter l’hypnose : j’en suis fasciné ! Heureusement, un éclair vient rompre l’envoûtement qui se dessinait .. éclat d’un sourire de Séléné qui, furtive, me sauve entre deux bancs de brume.
Je halète, j’halète mais pas encore d’allaitement pour moi …. l’instant vire au cauchemar sans queue ni tête, aurai-je abusé de desserts ? Le feu de Râ a-t-il consumé, sournoisement, la mécanique de mes (deux) neurones supérieurs ? Suis-je en état de lévitation transcendantale suite à un rail jointé de colle ?
J’y crois pas !
Maintenant, dégingandé, issu des brumes en lambeaux c’est un simulacre de King-kong (oui avec un K et un g à la fin … ça résonne mieux) mité qui se traîne en grognant et en bavant : l’image est … c’est un orang dégouttant qui s’avance en crabe, se frappant de ses poings sales le torse creusé à force de « je, moi » …. un ego velu bas sur pattes en quelque sorte. L’image paraît hardie, elle n’est que pathétique.
Une odeur iodée se répand et coule là et ici, comme si la brume larmoyait une odeur de morue .. curieuse impression olfactive qui titille mes narines pour une fois, hélas, non bouchées. Rien n’est parfait en ce bas monde, n’est-ce pas ? Hors donc ce « parfum » attise ma curiosité, mon oeil droit, le gauche ne servant qu’en période électorale, fouille (masqué par un voile de gaze) les bancs d’humidité rampante qui s’étalent comme des tartines de brandade.
Découverte : une poissonnière ! C’est une histoire de fou que cette hallucination délirante qui se déroule comme un serpent, qui telle une liane, cernerait un fût pour échapper aux gueulardises d’un primate douteux.
J’allucine !
Une autre ritournelle semble percer, note à note, le rideau grisâtre de l’humidité voilant la noirceur de la nuit obscure : « marinella, j’ai pris tes …… » sirupeuse romance d’inspiration, si on peut dire, îlienne proche de la Sardaigne. C’est un moustachu, au poils noir, qui se glisse avec une paresse (oui ainsi ils sont deux) langoureuse pour, sans heurt, disparaître poussivement sans excès de transpiration vers le bas … le haut étant ardu à vaincre à cette allure là.
Soudainement c’est une paire de motards souriant qui fusent du magma qui ternit ma vision .. enfin un sourire, double, dans ce défilé quelque peu dantesque et fantasmagorique …. une sorte de rayon pétaradant de soleil au gasoil surmonté là et ici par deux casques aux visières miroir.
La fissure se referme sur les gaz d’échappement, qui se diluent dans l’atmosphère, aux échos assourdissant qui s’estompent dans l’épaisseur de cette masse informe qui étouffe tous et tout.
Instant de silence, respiration retenue, attente crispée …. Un évènement serait-il sur le point de couler ce nuage bas, de ce brouillard dense, de cette purée non salée ?
J’observe muet ce moment cristallisé comme un souffle gelé, une image bloquée, un son coupé. Intense suspens ..
Transhumance ..
Ici où là ce sont des troupeaux de vaches meuglant, des régiments de moutons bêlant dans une cacophonie de grelots (comme pour les « fous » de jadis) et de clochettes/cloches comme … oui je vois que tu as deviné …. Et bien en cet instant où rien ne bouge, hors mes pensées et mon impatience congénitale, je retiens mon souffle dans l’attente, la tente aussi (pour résister à l’humidité ambiante).
Branlante, comme un spectre, se devine l’ombre trouble d’une silhouette étrangement proéminente en une démarche hésitante, les pieds semble-t-il en canard …. comme oui, tu devines là aussi …. comme une femme enceinte.
J’écarquille les hublots comme l’écoutille d’un navire dans la tempête … S’estompe un peu cette brume pègueuse qui couvre ce profil étonnant de rondeur quasi plantureuse .. pourtant ce n’est point un fût (en chêne), un tonneau (de bière), une barrique (de vinasse), non ce n’est pas tout cela, mais qu’est-ce donc ? Dis moi ce que tu en penses toi, interloqué comme moi que tu es dans cette expectative presque douloureuse, un chouya angoissante.
E.T. ? Une monstruosité ? Une horreur horrible ? Une aberration de la nature ? Une épure ratée ? Une ébauche débauchée ?
Je suis perplexe .. j’essaye de mieux voir au-delà de l’image estompée qui glisse, ventre en avant, deux éclats miroir en place d’yeux, humide de sueur plus que de bruine, en chuchotant comme glapirait un coyote » y-a quelqu’un ? ». Serait-ce le pâtre (non pas grec, ni le fromage d’ailleurs) de la troupe dépareillée et dépenaillée que j’ai cru apercevoir tantôt, bouche bée tant la stupeur m’immobilisait ….
Un berger, mais alors où se trouverait son clebs miteux (ressemblance probable) devant rassembler, rameuter ce régiment brinqueballant qui s’est laissé aller à heurter mon imaginaire devenu réel, ici et maintenant. A moins que …. lui-même …. tout seul …. fut un aboyeur de première …. les mal embouchés diraient une « grande gueule ».
Je divague sous le choc de l’émotion intense et profonde.
Le pâtre imposant, pas son diamètre essentiellement, sort en mesurant la largeur du chemin, tangue comme un bateau ivre, l’oeil légèrement vitreux, l’estomac le précédant, la voix éraillée éructant « où qu’elles sont les donzelles ? » L’écho de sa solitude du moment lui rétorque en raisonnant … « où sont les ailes ? » …. mais foin d’angelot (c’est condamné par la loin protégeant les mineur(e)s) ; reste à chanceler en zigzaguant pour al-lécher le goulot d’un canette rouillée.
Bizarre …. l’accouchement doit être proche, si je vois bien l’ampleur de la taille, la mise bas ne devrait tarder …. comme l’échouage d’un phoque après une tempête dans un verre (de vin).
Soudain, tout à coup, d’une manière prompte et subite, de façon inattendue et inopinée, l’instant est foudroyant, imprévisible …. brusquement un couinement chafouin retentit, comme le grincement d’agonie d’une cornemuse percée : mes gazelles (pas les cornes sirupeuses) je vous vois et vous reconnais malgré l’épaisseur … de la ouate qui nous sépare !
Ouf ce cri libérateur me fée sursauter, dessille mes illusions quasi éthyliques, rompt l’hypnose psychédélique comme la substance que tu connais (voyons …. c’est du chocolat dont il s’agit !), bref j’arrête de léviter pour reprendre pied sur le sol ferme et m’apercevoir que la nuit est tombée, sans bruit par discrétion ….
Je m’ébroue, je quitte mon immobilisme statutaire, je refait surface, je respire à nouveau …..
Quelle conte abracadabrant que ce songe bleu éveillé alors que la digestion de l’encas du « subway » s’achève et va mener mes pas vers un café frappé, frappé comme cette histoire tordue ….. et si c’était vrai ???
Un regard vers l’azur étoilé me rassure …. ton sourire y est encore, toujours, et j’aime …
Chris
juin 6010
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Hébé… à l’Aube de mon ultime passage sur la toile du Mêtre, ton imaginaire m’a fée basculer dans un univers pour le moins ennivrant… et pour ne pas être aspirée par l’ivresse de tes profondeurs, j’ai pris une longue inspiration afin de me transporter, via l’expir, dans Mon ImaginR.
Et me voilà en_mêlée dans la mouvance de cette troupe dodelinante et guillerette, heureuse comme Ulysse de faire un beau voyage. Juste le temps de voir ma silhouette au milieu de ces formes ouatées, de transe_humer cette odeur enveloppante mais pas dérangeante… mélange subtil du règne animal et végétal et, …d’un léger bruissement d’ailes …pfffffffffffff, je me retrouve dans un ailleurs que je ne saurais d’écrire… plus de bruit, plus d’odeur, plus de formes… et splash… la bulle éclate et me dépose à la périphérie de ton imaginaire… entre haut et bas, entre moutons et subway ; pour le coup, je suis frappée (et l’on vous ouvrira… il se pourrait…), non point comme ton Kfée mais par l’apparition soudaine de deux mots qui viennent se poster à un battement de cils de mes iris ..« Mouton-Cadet » !
Non mais, je rêve ! Serait-ce possible qu’une chaîne de resto rapid’ agrémente vos class’croûtes de ce gouleyant breuvage, issu du royaume d’Aliénor, berse_eau de la laïcité, dont il semblerait que le Ptit Père ait commencé à polir sa pierre… à Pons… Le baron(d) ne disait-il pas du vin « …il naît puis il vit, mais point ne meurt, en l’homme il survit »… hum, hum…, je m’arrête ici pour ne pas basculer à nouveau dans ma bulle, quoique, en matière de bulles… non,non, pas celles du Pape… mille pardons Alphonse pour cette offense à ta sublime œuvre gorgée de soleil et rythmée par le chant des cigales, il ne s’agit là que d’une erreur non pas des_cartes mais simplement de Lêtre… je disais donc, s’agissant des Bulles à Pépin, que j’aime à verser dans celles qui émergent des terres paisibles si chères au non moins paisible Chrétien…
J’aime…
… à observer leur ascension asynchrone le long de la flûte… la flûte enchantée… et voilà, me voici repartie, mais cette fois-ci dans l’univers musical d’Amadeus ou de Mickael Flatley… The Lord of the dance…
A présent, il suffit, je file… non point Dame quenouille,… terminée la mise en sommeil alors que mon frère cadet vient seul_man de me r_éveiller !
Voilà, à présent, je m’éclipse en silence, sur mes (irish) pointes éthérées… just in a contact of the thread of my life… silence…
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