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UNE CRITIQUE DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE PAR NOTRE AMI L’ÉCRIVAIN ET INGÉNIEUR WALY FAYE 13 mars, 2025

Posté par hiram3330 dans : Apports , trackback

UNE CRITIQUE DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE PAR NOTRE AMI L’ÉCRIVAIN ET INGÉNIEUR WALY FAYE

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« L’intelligence artificielle et épidermisme continentaliste »

L’intelligence artificielle, cette technologie qui va mettre dans le circuit des machines l’intelligence humaine pour ensuite la surpasser, connaît un classement lié aux phases d’évolution : Il y a l’intelligence artificielle faible qui est capable d’accomplir des tâches spécifiques et limitées, telles que la reconnaissance d’image ou les chatbots. Elle n’a pas de conscience ni d’intelligence générale, et ne peut exécuter que ce pour quoi elle a été programmée. Au deuxième niveau se trouve l’intelligence artificielle forte ou intelligence artificielle générale, AGI, qui désigne le niveau où une machine est capable de comprendre, d’apprendre et d’effectuer des tâches variées à un niveau comparable à l’intelligence humaine. Elle sera capable de raisonner de manière flexible et d’adapter ses connaissances à de nouveaux contextes. Au troisième niveau, se situe l’intelligence artificielle super-intelligente qui dépasse l’intelligence humaine dans tous les domaines, y compris la créativité, la résolution de problèmes et la prise de décision. Ce type d’IA pourrait améliorer elle-même ses capacités, jusqu’à surpasser l’intelligence humaine dans tous les aspects, aboutissant donc à la singularité technologique, avènement contre lequel Carl Sagan et Stephen Hawking ont mis en garde dans la mesure où l’homme est en train de créer quelque chose à son image alors que cette image lui est inconnue, lui échappe.

L’intelligence artificielle avance avec fulgurance et représente un grand tournant dans le devenir de l’humanité, et, comme lorsque durant la pandémie de Covid-19 j’attirai l’attention à travers un article, il exige de revoir, nous africains, nos paramètres d’analyses devant l’opportunité de changement de tangente offerte par des situations majeures. Pareils moments nous secouent profondément et devraient nous pousser à nous réveiller devant des réalités que nous devons affronter en secouant notre penchant émotif qui sert tout sauf la technologie puisque non fruit de la raison. En effet, lors de cette période de pandémie qui nous confinait et nous laissait bien solitaires avec notre finitude dans la marche du monde et une famine aboyant à nos portes, il y eut un sursaut émotionnel qui ne survivra pas : des créations de génie, des remèdes à l’Artemisia…On alla jusqu’à décréter que l’Einstein du XXIème siècle sera africain, chose à laquelle j’avais applaudi puis apposé un « amen » malgré l’amère remarque que « des Einstein ne se décrètent pas, ils se forment ».

En effet plusieurs évènements nous ont secoué les côtes d’un farouche coup de coude éveilleur, mais notre réveil n’a jamais dépassé l’orée de l’émotion : la deuxième guerre mondiale nous permit l’aspiration aux indépendances car la France occupée et refusant cette occupation ne pouvait plus continuer à nous imposer la sienne en plus du fait que la finitude du maître le long des tranchées s’était faite jour. Léopold Sédar Senghor nous le décline en termes clairs : « …la France qui refuse l’occupation et me l’impose gravement, qui dit la République et livre mes terres aux grands concessionnaires… ». Jean-Paul Sartre résume bien cette réalité dans Orphée noir : « Qu’est-ce donc que vous espériez, quand vous ôtiez le bâillon qui fermait ces bouches noires ? Qu’elles allaient entonner vos louanges ? Ces têtes que nos pères avaient courbées jusqu’à terre par la force, pensiez-vous, quand elles se relèveraient, lire l’adoration dans leurs yeux ? ». C’est dire que sans cette singulière aventure, l’accès aux indépendances aurait pu connaître un autre périple.

Et voilà que se présente un autre virage, l’avènement de l’Intelligence Artificielle qui marquera plus profondément les gaps et différences, allant jusqu’à remettre en question le devenir de l’humanité puisque posant un risque de discontinuité et le danger de la dystopie lorsqu’on aura atteint la singularité technologique. Mais bien avant cette secousse future, c’est l’Afrique qui encaissera un choc avec son onde comme dans la dynamique d’une explosion nucléaire. C’est que, contrairement à notre approche superficielle, certaines fortes têtes de l’avancée technologique envisagent la possibilité que l’homme actuel n’est peut-être pas le produit fini, et est donc appelé à atteindre un autre niveau de développement.

Chaque jour le Sénégal parle de numérique, d’intelligence artificielle et il me semble qu’encore une fois nous allons rater gravement ce virage. Comme avec la mode « Check-down » sur laquelle nos jeunes se sont jetés sans en comprendre les orientations sexuelles sous-jacentes, nous ne nous rendons pas compte qu’on a commencé à parler de la Superintelligence, qui mènera forcément vers la Singularité ou singularité technologique qui est « l’hypothèse selon laquelle l’invention de l’intelligence artificielle déclencherait un emballement de la croissance technologique qui induirait des changements imprévisibles dans la société humaine. Au-delà de ce point, le progrès ne serait plus l’œuvre que de systèmes d’intelligence artificielle qui s’auto-amélioreraient, de nouvelles générations de plus en plus intelligentes apparaissant de plus en plus rapidement dans une « explosion d’intelligence », débouchant sur une puissance superintelligence qui dépasserait qualitativement de loin l’intelligence humaine ».

Mais, pour ce qui concerne notre continent, là n’est pas le problème primordial. Ce n’est pas uniquement l’Afrique qui est concerné à ce niveau. Là où le bât blesse, c’est qu’en matière d’intelligence artificielle la langue est centrale puisque c’est l’interface qui unit les hommes le mieux et il n’en sera pas moins entre les androïdes de demain et les humains. Or même sur les éléments de base nous massacrons nos langues là où nous nous efforçons à déployer quelques efforts les concernant. Il suffit de considérer nos titres de programmes télévisuels qui sont tous bâclés ; nos chansons qui ignorent tout de la morphologie et de la phonétique de nos langues qui connaissent les paires vocaliques, longues vs courtes, laissant à l’auditeur la nécessité d’aller glaner un sens selon les circonstances de la chanson, sans oublier nos scandaleux « ki nga xamante ne », « mooy que ne » …

Si l’IA a atteint son niveau conversationnel, c’est grâce au « Machine Learning » et au « Deep Learning » qui s’appuient sur DeepMind à qui succèdera le World Brain. Des Spiders, bots se réveillent à intervalles réguliers pour aller chercher de l’information à travers le réseau mondial et s’abreuver aux plateformes des réseaux sociaux, à des encyclopédies en ligne comme Wikipédia ou s’appuyant sur des moteurs de recherche comme Google qui a damé le pion à Yahoo et à Altavista, Web Crawler ayant été spécifiquement orienté vers la recherche de sujets scientifiques. Il y a toujours les sources des BBS (Bulletin Board Systems) et les archives universitaires qui furent stockées sur le Gopher, un protocole de la première heure, années 80 et fin années 90, utilisé par les universités et les instituts de recherche pour distribuer, rechercher et télécharger des documents bien avant l’expansion de l’Internet et du World Wide Web. Si le doute subsiste, il faut considérer la nomination du joyau chinois « DeepSeek » qui veut dire « Recherche profonde ». Qu’avons-nous à rechercher en sérère, wolof, diola, bambara, baoulé ou fon ? Quelle est la quantité de textes archivés de ces langues ?

C’est riche de toutes les ressources d’archives existantes que l’Occident s’est progressivement lancé sur le chemin actuel alors que nous ne faisons rien pour nos langues nationales qui doivent forcément être la pierre angulaire sur laquelle nous devons bâtir. La robotique se charge de la bipédie et se munit de sondes et de caméras pour pouvoir se déplacer dans un environnement ; les processeurs deviennent plus sophistiqués pour la computation et les capacités de stockage évoluent tout le temps pour emmagasiner les données dont le partage ne pourra pas ne pas être linguistique. Voilà pourquoi ne pas prendre au sérieux nos langues nationales pour nourrir l’IA d’archives s’avèrera être une faute irréversible et nous fera rater un virage déjà amorcé. Si nous échouons devant DeepMind, qu’en sera-t-il à l’apparition de Word Brain ? Le sursaut est possible mais c’est à faire maintenant, avant que ce ne soit trop tard et pour cela, il faut parler alphabétisation avant de parler de souveraineté numérique.

À l’ère actuelle, l’intelligence artificielle (IA) a révolutionné nos modes de vie, offrant des solutions innovantes dans divers domaines tels que la santé, l’éducation et les services publics. Cependant, l’adoption massive de l’IA n’est pas sans conséquences, notamment pour les langues qui n’ont pas une tradition littéraire bien établie. Les langues minoritaires, souvent parlées par des communautés réduites, sont particulièrement vulnérables face à l’IA. Voici quelques points clés à considérer :

1. Déficit de Données et de Représentation : Les modèles d’IA, notamment ceux utilisés pour le traitement du langage naturel, dépendent de vastes corpus de données textuelles pour fonctionner efficacement. Les langues qui manquent de documentation littéraire sont sous-représentées, ce qui limite la capacité de l’IA à comprendre et à traiter ces langues de manière précise.

2. Érosion Culturelle : L’IA contribue à la standardisation linguistique en favorisant les langues dominantes, souvent au détriment des langues minoritaires. Cette situation peut entraîner une érosion culturelle et la perte de traditions orales précieuses, qui sont les vecteurs de l’identité et de l’histoire des communautés.

3. Accessibilité et Inclusion : L’absence de support linguistique pour les langues minoritaires dans les technologies basées sur l’IA pose un défi majeur en termes d’accessibilité. Les locuteurs de ces langues risquent d’être exclus des avantages offerts par l’IA, créant ainsi une fracture numérique qui renforce les inégalités existantes.

4. Autonomisation des Communautés : Pour contrer ces menaces, il est essentiel de développer des initiatives visant à inclure les langues minoritaires dans le développement des technologies de l’IA. Cela inclut la documentation des langues, la création de bases de données linguistiques et la collaboration avec les communautés pour préserver et promouvoir leur patrimoine linguistique.

En résumé, bien que l’IA offre des opportunités prometteuses, il est crucial d’adopter une approche inclusive tenant compte des langues minoritaires. Le cas contraire fera revenir cette domination que Jean-Paul Sartre, encore une fois, reposait sur la suprématie technologique. Nous allons le citer à rebrousse-poil : « … Si nous voulons faire craquer cette finitude qui nous emprisonne, nous ne pouvons plus compter sur les déboires de notre race, de notre couleur, de nos pyramides hypothétiques : nous ne pourrons nous rejoindre à cette totalité d’où ces yeux blancs nous exilent qu’en arrachant nos maillots noirs pour tenter simplement d’être des hommes. », des « doomu Aadama biir doomu Aadama yi », c’est-à-dire « enfants d’Adam parmi les enfants d’Adam ».

La diversité linguistique et culturelle est une responsabilité collective qui nécessite une action concertée de la part des gouvernements, des chercheurs et des entreprises technologiques. Mais il faut, auparavant, que ces langues soient maîtrisées par leurs propres sujets, des archives alimentées, par-delà l’épidermisme continentaliste déphasé et irréaliste dans un monde fédéré. »

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